La fonction expressive du geste entretient des relations directes avec la régulation de l’attention, la persuasion, la motivation . La manière dont nous occupons l'espace gestuel dépend de critères comme la fréquence des gestes, leur tonicité , leur amplitude. Certains orateurs font des gestes larges et très visibles, tandis que d'autres contrôlent cette gestualité (par exemple en croisant les bras tout en parlant, ou bien en joignant les deux mains devant leur thorax en forme de pyramide).
Une question au passage : ceci dépend il plus ou moins du caractère ? Rares sont les essais en laboratoire à ce sujet, mais ils concluent que les sujets les plus éloquents semblent être les plus expansifs gestuellement . D'autres tests montrent que les personnes aux gestes les plus expansifs obtiennent les scores les plus élevés aux questionnaires d’extraversion et ascendance . Des psycholinguistiques observent également que les hésitations verbales vont de pair avec des gestes rétrécis , autocentrés et que lorsque la parole redevient plus fluide, elle s’accompagne alors de gestes plus centrifuges et larges.
Mais quel va être l’impact de l’expansivité gestuelle sur l'interlocuteur? Cet effet visuel n'est pas linéaire. Si d'un côté une gestuelle tonique peut restimuler l’attention (tout comme les variations intonatives d’un orateur ), trop de gestes omnidirectionnels peuvent jouer un effet de distracteur .
Voici un premier exemple: dans cette interview Jean François Kahn développe comme souvent , des gestes amples et de grande altitude (niveau supérieur aux épaules, à la tête…) . On peut remarquer la symétrie de ces gestes, bimanuels pour la plupart.
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Certains de ses gestes sont analogiques et illustrent ainsi la parole :
- il y a une France d’en haut, du très haut …
- un monde completement refermé sur lui-même /complètement clos/ complètement coupé
- une bulle qui grossit
- elle n’enveloppe qu’une petite minorité
Par contre d’autres gestes similaires du communicateur n'ont aucune pertinence sémantique (pas de connexion avec le contenu verbal) et servent à donner de l’emphase. Or une gestuelle ininterrompue n’exerce guère d’impact positif sur l'attention , tout comme un texte qui serait continuellement souligné.
A présent, un autre exemple de personnage hyper-expressif est l'écrivain Daniel Picouly. Dans cet extrait , une certaine forme de saturation visuelle s’installe qui peut capter l'attention, mais sans pour autant jouer en faveur de la «lisibilité» du message oral:
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Ces gestes sont très centrifuges et omnidirectionnels . Ils peuvent présenter quelque analogie avec le discours de l’interviewé sur la foule, le mouvement, l'émergence, la surprise. Mais dans ce contexte leur omniprésence peut devenir une source de bruit et induire du partage d’attention , une instabilité du modèle mental . On compare parfois la perception des gestes co-verbaux à une balance entre la forme et le fond, où la parole occupe l’avant plan et le geste l’arrière plan. Or ce rapport perceptuel forme/fond peut être inversé .
vidéo 3 (fermer la pub de TF1 pour la lire,merci) |