L’imagerie thermique du visage ou Stress Cam n’est pas une technique spécialement récente, mais elle suscite actuellement un regain de questionnements depuis ses balbutiements en aéroport . Ce système , qui détecte en quelque sorte les rougeurs sous-jacentes du visage, analyse parmi diverses units faciales les zones autour de l'œil et les joues, très sensibles à l'élévation de température suscitée par le stress.
Cette technique a été présentée comme offrant une validité comparable à celle du test Polygraph avec l'avantage que les patterns thermiques du visage de chaque passager pourraient être mesurés de façon non intrusive. Ceci permettrait donc par hypothèse, de démasquer à distance et discrètement les passagers dotés d’intentions terroristes ou malveillantes.
La controverse scientifique porte cependant sur sa fiabilité à cibler le mensonge à l’intérieur de manifestations émotionnelles tells que l’anxiété. Or, les passagers des aéroports ainsi filmés peuvent ressentir des éléments d’anxiété pour diverses raisons : peur de manquer le départ , anticipation d’un rendez-vous induisant du stress, phobie du voyage en avion , émotion liée aux vacances, au choc culturel anticipé. En effet l’accélération du débit sanguin et la dilatation des vaisseaux, peuvent être pleinement induits par de tels facteurs. Autre point sur la méthode: une mesure de la condition contrôle ( imagerie ‘thermofaciale’) du sujet testé en condition non mensonge devrait être faite en vue de comparaisons, avant de produire une carte thermique censée refléter le phénomène mensonge.
Un étude de validité sur ce thème a été menée par Aldert Vrij ( Université de Portsmouth). Les sujets interviewés à propos de leur voyage ont été invités à dire la vérité ou, au contraire, à mentir , à partir de différentes questions telles que " êtes vous déjà allé vers cette destination ? ", " quelles sont les raisons de votre voyage ?" . Dans un tel dispositif les sujets dits menteurs ont davantage de charge cognitive et sont en rupture de cohérence interne avec leurs discours , ce qui explique une certaine action végétative (une autre façon de forcer la charge cognitive est de leur demander de raconter leur séquence d’histoire à l’envers).
Deux méthodes de mesure ont été comparées , l’une utilisait une caméra d'imagerie thermique placée à 3 mètres . Parallèlement des enquêteurs formés à la détection humaine du mensonge , observaient les variations corporelles et verbales, sans être avisés à l'avance de la sincérité des sujets.
Les résultats obtenus par les caméras étaient assez significatifs , à savoir qu’à un niveau statistiquement supérieur au hasard, 68% des sujets « francs » et 65% de menteurs ont été classés correctement. Mais l’autre information intéressante est que les Stress cams affichaient un taux de réussite inférieur aux performances des enquêteurs: ces derniers avient classés correctement 72% des sujets francs et 77% des menteurs, en se basant uniquement sur l’observation comportementale et linguistique ... Cette expérience montre également que l'imagerie thermique pourrait avoir une valeur d'indice plus élevée dans le contexte interactif où les passagers sont interrogés. Autrement ils ne sont confrontés qu’à eux mêmes lors de la capture d'image (et n’ont pas forcément mauvaise conscience ou de tension physiologique particulière quand bien même ils seraient mal intentionnés) .
Au final les auteurs invitent à relativiser la pertinence du système artificiel et à privilégier les recherches et formations liées aux compétences humaines de reconnaissance non verbale . Tout en les rejoignant sur ce point on peut également envisager idéalement une utilisation conjointe des deux dispositifs , l'un qui porte sur le somatique sous-jacent non visible à l'oeil nu, le second sur une sémiologie du visible et de l'audible.