blog proposé par Guy Barrier

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Guy Barrier, expert en communication non verbale - publications et activités: pointer la photo

mardi 20 décembre 2011

musique et émotions, quelles relations?


L’étude des rapports entre musique et émotions est intéressante car la musique est une forme de communication non verbale, au même titre que la mélodie vocale. Elle exerce un effet sur nos perceptions de l’environnement , du temps qui s’écoule, sur propres humeurs,  sur notre santé , notre motivation, notre niveau de stress et le système parasympathique. Ces effets se manifestent d'ailleurs lors d' expressions faciales inconscientes, de mouvements de tête, du corps… Les pratiquants d’aérobic par exemple, auraient plus de mal à se motiver si on arrêtait soudain le rythme modélisé par le cerveau .

De multiples  expériences en marketing sensoriel ont constaté les effets de la musique d’ambiance sur des consommateurs, sur l’excitation de scolaires  au réfectoire, sur la production laitière , etc. Dans le monde animal diverses observations ont été relevées : de la musique rock sur des souris engendrerait leur agressivité tandis que chez le macaque, on remarque une diminution de l’agressivité avec la musique classique .

Le rythme pourrait même agir sur nos horloges internes et modifier notre échelle subjective de temps : des études relèvent que dans un magasin  la même musique jouée avec un tempo lent (moins de  73 bpm) entraine des trajectoires de clients plus lentes qu’un tempo rapide. D’autres observations  font ressortir que de la musique lente en cafétaria ou restaurant , induit chez les clients davantage de temps consacré  (et de consommation) que dans le groupe exposé à un rythme de diffusion plus rapide :  le tempo lent induirait le sentiment que le temps passe moins vite,  les clients discutant alors davantage  avec les serveurs;  la vitesse à laquelle on ingurgite les plats  s’en trouverait même ralentie .

De manière générale le temps d’attente (de trajet, etc) est toujours estimé moins long en condition musicale que silencieuse . Une musique d’attente au téléphone permet statistiquement de limiter les raccrochés (mais  une musique relaxante n’entretient pas aussi bien  la motivation). Par contre une autre étude, en magasin ,montre que lorsqu’une musique est diffusée fortement les clients ont tendance à s’en aller  plus rapidement  (beaucoup  de nos grandes surfaces semblent ignorer d’ailleurs ce principe !) Egalement des personnes exposées à 90 décibels pendant 3 minutes trouvent le temps plus long que lorsqu’elles sont exposées au seuil "normal" de 60 db . Dans un bar, constate N. Guéguen,  la consommation d’alcool augmente légèrement lorsque la pression acoustique est élevée  .

Plusieurs méta-analyses portant sur des dizaines de travaux universitaires concernant ‘musique et santé’, montrent des effets positifs marqués par des niveaux réduits de cortisol, de la pression sanguine, du rythme cardiaque et par l’augmentation des signes de résistance du système immunitaire   Selon une partie des travaux ainsi analysés la musique pourrait atténuer la douleur en déplaçant l'attention du patient . D’autres chercheurs estiment que l'amélioration est trop faible pour être cliniquement significative  mais invitent à approfondir les investigations.

Plus homogènes sont les études qui suggèrent que la musique peut réduire l’anxiété, notamment avant une opération , dont une qui montre qu’elle peut même aider les chirurgiens à gérer le stress et la précision.  Au niveau des troubles du  sommeil  des médecins ont expérimenté les effets de 45 minutes par soirée de musiques sédatives  sur des personnes âgées  et ont constaté des durées de sommeil plus longues et moins interrompues.

En compétition sportive une  baisse du stress a été observée sur des groupes de tireurs ayant intégré au cours de leur préparation 20 minutes de  musique relaxante .  En dehors de cette dernière , les effets plus spécifiques de différents styles de musique n'ont pas été  démontrés . En comparant les effets différentiels de styles diffusés durant des taches de réflexion complexes il a été constaté une récupération du métabolisme plus rapide chez les sujets bénéficiant de musique, mais sans différence comportementale liée aux styles (cettte notion intégrant trop de critères).  En marketing sensoriel on observe néanmoins que le style  véhicule différentes connotations , ainsi la variété sera plutôt attribuée à  un établissement de consommation courante tandis que la musique classique qualifie mieux les lieux  haut de gamme  (et peut ainsi inciter disent des enquêtes, des clients à se méfier...)

La variable la plus opérationnelle pour la mesure des effets  pourrait être le rythme . La musique lente induit une respiration plus ample, diminuant ainsi la pression artérielle et le rythme cardiaque, tandis que les tempos rapides ont sur le système cardiovasculaire des effets opposés (cf. notamment les expériences de L. Bernardi & P. Sleight) . Cet effet serait renforcé chez les musiciens car ces derniers ont appris à synchroniser leur respiration sur le rythme qu’ils jouent, mais nous sommes nés avec cette réceptivité qui déja permettait au foetus d’interpréter des événements  sonores: les crescendos et accélérations nous émeuvent toujours alors que les decrescendos nous apaisent. Les compositeurs ou réalisateurs de cinéma le savaient depuis longtemps, mais ils n'avaient pas de méthode clinique ou d'EEG pour le constater .

mercredi 9 novembre 2011

Distraction ou présence , quel indices corporels ?

Le  phénomène du manque d’attention est  une problématique qui intéresse à la fois  la psychologie clinique, les théories de l’esprit et  les méthodes de développement personnel.  Une grande part des  distractions , vagabondage des pensées ou égarements de l’esprit  proviennent des émotions passagères et de traces que nous ont laissé ces émotions (positives , négatives, mixtes) , ainsi que de nos « états d’âme », « humeurs », « ruminations » . Dans un domaine plus clinique , par exemple chez le dépressif, l’inconfort émotionnel est potentialisé par la fréquence des activations , leur intensité et leur disproportion au regards de l’événement objectif.


L’université de Harward  a mené un expérience sur plus de 2000 sujets, grâce à un tracking installé sur une application i-phone qui leur demandait à intervalle régulier leurs états d’âme . Ces derniers revélaient ainsi qu’ils passaient 30% environ de leur temps à être distraits au cours d’activités précises (et 47% sur le temps général)  ; de même  des tests sur  la lecture passive font ressortir 15 à 20 % de temps  hors vigilance. 



Si l’on ramène le phénomène des petites pensées  passagères à un modèle cognitif  de la performance, on pourrait dire que ces dernières , selon un paradigme attentionnel, proviennent d’une  difficulté à se concentrer sélectivement sur une cible et de l’apparition de  distracteurs , qui alternent perceptivement selon un modèle de la forme et du fond, entre avant-plan  et arrière plan  .  En fonction des moments (notamment selon que l’on est  actif ou non , fatigué ou en forme)  l’attention principale peut avoir du mal à s’imposer face à l’attention secondaire ,  d’une qualité moins consciente . Selon d’autres théories , le manque d’attention au moment présent  est lié au fait que la concentration implique un cout cognitif plus élevé et un contrôle de sa continuité tandis que les pensées de type rêverie proviennent de routines automatiques et ne sollicitent pas d’effort .



Les indices d’hypo-vigilance ont surtout été examinés par des ergonomes dans des situations expérimentales de conduite ou d’utilisation d’interfaces  . Mais au niveau des traces visibles de l'inattention lors d’ interactions avec une interlocuteur , peu d’éléments ressortent de la littérature  . Pourtant la présence à autrui est un indice important,  par exemple en pédagogie, en relation de soins, en entretien d’aide , et celui qui communique ne peut se contenter de simples hochements de tête (parfois routiniers)  pour vérifier que le message a bien fait son chemin.


Différents indices que la clinique a observés chez le sujet dépressif, permettent d’inférer que le sujet  est  déconnecté du présent : son regard est perdu dans le vague et légèrement divergent, il réagit avec retard , demande qu’on lui répète ( comment ?) , la posture est affaissée, la tête éventuellement en appui sur le poignet, etc. 


Le corps en mouvement peut également révéler  des marques  de désengagement de l’activité motrice consciente , de mise en suspens  du contrôle corporel  (s’arrêter de marcher pour réfléchir, etc) . Cette suspension du contrôle se fait  au profit d’activités  automatiques à faible vigilance (mais c’est à ce moment qu’on échappe son stylo, ou qu’on reçoit un coup de klaxon intempestif). En situation expérimentale de pilotage d'autres signes sont analysés tels que  certains mouvement oculaires, les rotations de la tête et la direction du regard, les baillements,  l'affaissement des paupières lié à l'assouplissement du releveur , la pression des mains sur le volant , les clignements des yeux en fréquence et leur délai de fermeture/réouverture,etc.


Un  aspect inattendu est le fait que les humeurs et les modalités de l’attention auraient partie liée. Plusieurs recherches suggèrent  que l’optimisme est corrélé à une attention élargie (y compris l’attention visuelle), alors que l’anxiété semble corrélée à une attention rétrécie. Les méthodes oculométriques employées ici, montrent des corrélations entre l’amplitude du champ attentionnel  de vision et l’humeur positive . Ceci se reflète  notamment par l’amplitude des mouvements, des tracés plus élargis , moins de points de fixation de courte durée, des distances entre les points plus longues,  un mode d'attention et plus  exploratoire  . En comparaison les sujets plus pessimistes laissent des traces de réinspections fréquentes et retours vers les détails comme pour vérifier. On notera que ces résultats empiriques donnent consistance à des théories plus anciennes et dépourvues de tels moyens de vérification, qui postulaient des différences dans le mode d’attention sélective entre « introvertis » ou « extravertis » (Eysenck) ,  ou bien « large » et « non large » (largeur du champ de conscience de  Le Senne).  

Quelques références: 

The restless mind.  Swallwood & Schooler

jeudi 29 septembre 2011

Caméras thermiques et aéroports: une alternative sérieuse à l'expertise humaine ?

L’imagerie thermique du visage ou Stress Cam n’est pas une technique spécialement récente, mais elle suscite actuellement un regain de questionnements depuis ses balbutiements en aéroport  . Ce système , qui détecte en quelque sorte les rougeurs sous-jacentes du visage, analyse parmi diverses units faciales les zones autour de l'œil  et les joues,  très sensibles à l'élévation de température  suscitée par le stress.
Cette technique a été présentée comme offrant une  validité comparable à celle du test Polygraph avec l'avantage  que  les patterns thermiques du visage de chaque passager pourraient être mesurés de façon non intrusive. Ceci  permettrait donc par hypothèse, de démasquer à distance et discrètement les passagers dotés d’intentions  terroristes ou malveillantes.

La controverse scientifique porte cependant sur sa fiabilité à cibler le mensonge à l’intérieur de manifestations émotionnelles tells que l’anxiété.  Or, les passagers des aéroports ainsi filmés peuvent ressentir des éléments d’anxiété pour diverses raisons : peur de manquer le départ , anticipation d’un rendez-vous induisant du stress, phobie du  voyage en avion , émotion liée aux vacances, au choc culturel anticipé.  En effet l’accélération du débit sanguin et la dilatation des vaisseaux, peuvent être pleinement  induits par de tels facteurs.  Autre point sur la méthode:  une mesure de la condition contrôle ( imagerie  ‘thermofaciale’) du sujet testé en condition non mensonge  devrait être faite en vue de comparaisons, avant de produire une carte thermique  censée refléter le phénomène mensonge.
Un  étude de validité sur ce thème a été menée par Aldert Vrij ( Université de Portsmouth).   Les sujets interviewés à propos de  leur voyage ont été invités à dire la vérité ou, au contraire, à  mentir ,  à partir de différentes  questions telles  que " êtes vous déjà allé  vers cette destination ? ", " quelles sont les raisons de votre voyage ?" .  Dans un tel dispositif les  sujets dits menteurs ont davantage de charge cognitive et sont en rupture de cohérence interne avec leurs discours ,  ce qui explique une certaine action végétative (une autre façon de forcer la charge cognitive est de leur demander de raconter leur séquence d’histoire à l’envers). 
Deux méthodes de mesure ont été comparées , l’une utilisait  une caméra d'imagerie thermique placée à  3 mètres.  Parallèlement des enquêteurs  formés à la détection humaine du mensonge , observaient les variations corporelles  et verbales, sans être avisés à l'avance de la sincérité des sujets.  
Les résultats obtenus par les caméras étaient assez  significatifs , à savoir qu’à un niveau statistiquement supérieur au hasard, 68% des sujets « francs » et  65% de menteurs ont été classés correctement. Mais l’autre information intéressante est que  les Stress cams  affichaient un taux de réussite inférieur aux performances des enquêteurs: ces derniers avient classés correctement 72% des sujets francs et 77% des menteurs,  en se basant uniquement sur l’observation comportementale et linguistique ... 


Cette expérience montre également que  l'imagerie thermique pourrait avoir une valeur d'indice plus élevée dans le contexte interactif où les passagers sont interrogés. Autrement ils ne sont confrontés qu’à eux mêmes lors de la capture d'image  (et n’ont pas forcément mauvaise conscience ou de tension physiologique particulière quand bien même ils seraient mal intentionnés) .


Au final les auteurs invitent à relativiser la pertinence du système artificiel  et à privilégier les recherches et formations liées aux compétences humaines de reconnaissance non verbale . Tout en les rejoignant sur ce point on peut également envisager  idéalement une utilisation conjointe des deux dispositifs , l'un qui porte sur le somatique sous-jacent non visible à l'oeil nu, le second sur une sémiologie du visible et de l'audible. 

interactions et intercompréhension, un congrès en Bretagne les 25 & 26 novembre 2011

Le congrès I.I.I. 2011 ( Intercompréhension - de l'Intraspécifique à l'Interspécifique ) organisé par l'Université Européenne de Bretagne, aura lieu les 25 & 26 novembre 2011. L’objectif de ce congrès est de réunir une communauté pluridisciplinaire autour des dimensions qui construisent l’intercompréhension dans son sens le plus large. Il s'agira notamment de la présence, du temps, du contexte, des rituels, de la redondance, de l’acceptable et du refusable… à travers : les postures, les mimiques, le vocal, les émotions… et cela autour des trois entités que sont l'homme, l'animal et la machine . Quatre conférenciers  seront  invités :  Xavier Boivin :  Chercheur en éthologie;  Eric Brangier : Chercheur en ergonomie et psychologie du travail, Jacques Cosnier : Professeur émérite en psychologie des communications - Université Lumière Lyon2, Grégory Sempo : Chargé de Recherche - Université libre de Bruxelles .

Parmi les thèmes abordés: Homme-Animal : comment communiquer? Communication, interactions et contextes, La relation, une réalité inscrite dans un temps et un espace,  Les interactions homme-machine .
plus d'informations: http://www-valoria.univ-ubs.fr/congres/iii2011/programme.shtml.fr

lundi 12 septembre 2011

Un logiciel pour remédier aux compétences non verbales des enfants autistes

Lorsqu’on évoque l’autisme on pense souvent  à une simple dégradation des compétences de communication verbales, mais la communication sociale est dégradée à d’autres niveaux : absence de  gestes symboliques , expression corporelle sans relief, et les enfants autistes ont des difficultés à reconnaître les émotions exprimées par le visage (hormis le fait qu’ils reconnaissent difficilement un visage voire même certaines scènes visuelles) . Il a été souvent remarqué que leur perception du visage était  meilleure sous forme de dessins animés que de visages réels. 

Des expériences en ce sens ont d’ailleurs été menées avec des avatars virtuels, qui éliminent  les détails visuels de visage non pertinents pour focaliser sur les signifiants . Avec des moyens moins sophistiqués et  mis à la disposition de tous les établissements,  le Dr Jim Tanaka,  a conçu un logiciel sous forme de modules de jeu interactif  destiné à aider les enfants autistes dans la reconnaissance des expressions du visage.
Le programme  Let's Face It , a été expérimenté avec des résultats encourageants , car au bout de 20 heures d’apprentissage les enfants avaient déjà validé des acquis pour reconnaitre des affects faciaux.  Exemple de stratégies: en découvrant une expression définie sur un personnage, l’enfant placé devant une webcam  doit reproduire cette même émotion faciale . Le logiciel de reconnaissance du visage exerce alors une action sur le personnage animé si le sujet a réussi . Parmi plusieurs directions de recherches complémentaires il est envisagé de comparer par imagerie cérébrale comment  les zones de contrôle de la reconnaissance émotionnelle (gyrus fusiforme) ont été activées par l’apprentissage.

On mentionnera également des études en amont de cette application, qui  ont montré que ces déficits de la compétence miroir  des autistes viennent également d’un problème de négligence perceptive (neglect) :  des analyses eye tracking montrent  que lorsqu’ils regardent un visage ils ont tendance à négliger la zone des yeux mais se réfèrent beaucoup plus à la bouche ce qui rend pénalise le dispositif de décodage  .

Quelques sources utiles:

jeudi 28 juillet 2011

Botox et reconnaissance des émotions: incompatibilités à plusieurs niveaux...

 Si le Botox a des vertus esthétiques pour les personnes désirant aplanir leurs rides , on ne lui connaissait pas jusqu'alors une  propriété secondaire, celle d’aplanir la reconnaissance des émotions d’autrui . Il semble que les personnes qui en reçoivent des injections musculaires de neurotoxine voient en effet diminuer leurs capacités empathiques  C'est ce que révèle une étude d'une neuropsychologue, T L Chartrand. On savait jusqu'à présent que les personnes botoxées  (certaines d’ailleurs pour des problèmes de tics nerveux , hyper-clignements des yeux) étaient difficiles à décrypter au niveau de leur expression émotionnelle. Ceci en raison de l'inhibition visible de segments musculaires frontaux, relaxation induite par le médicament. Mais le phénomène se double de leur propre difficulté à ressentir corporellement les affects qu’ils perçoivent visuellement.

Pour mener l'expérience il a été demandé à des sujets de sexe féminin de regarder des photographies de visages de personnages et de les  faire correspondre à des émotions humaines  (un test fréquemment utilisé dans le champ  de l'autisme). Les sujets qui avaient subi un traitement de Botox lors des deux précédentes semaines se sont avérés beaucoup moins précis dans la reconnaissance émotionnelle que  ceux du groupe contrôle  qui avaient été traités avec un autre médicament.

Ceci rejoint plutôt bien le paradigme de l’embodiment
ou  “cognition incarnée” , qui défend que la façon dont nous pensons est ancrée dans notre corps : pour comprendre les émotions des autres nous devons en faire l'expérience  nous-mêmes  (cf. également l'analyseur corporel, Cosnier) . 

Il a été montré qu’en percevant une expression de douleur d’un tiers, un effet miroir se produit et nous manifestons en retour une micro-expression à un niveau très subtil, mais qui peut être plus explicite et visible selon notre sensibilité empathique. Cette contraction mimétique de la musculature faciale adresse alors vers notre cerveau un signal typique du ressenti qui nous fait ressentir l’émotion d’autrui. Avec le Botox les muscles faciaux sont comme endormis ce qui déconnecte donc les micro-réactions en miroir . Les signaux relatifs ne peuvent alors être adressés vers les modules de reconnaissance du cerveau et le sujet botoxé risque de ne comprendre  l'émotion qui lui fait face... 

Un chercheur de ce même  laboratoire a d’ailleurs commencé à étudier les conséquences sociales de ce disfonctionnement dans les relations conjugales , il envisage également les incidences cet ‘artefact’ sur la détection du mensonge.


jeudi 9 juin 2011

Les gestes des politiques à l'écran

Rien ne passionne davantage que les lapsus des hommes politiques ou à l'inverse leurs coups d'éclat grandiloquents permettant de renvoyer l'adversaire dans les cordes. Solidement ancré dans l'hégémonie actuelle du visuel, le média télévisuel suscite une balance d'attention entre le fond et la forme autrement dit schématiquement entre le verbal et le non verbal. « Priorité aux images », comme l'indiquaient hier les présentateurs des chaines télévisuelles au fil de l’audience DSK,  tandis qu’ils interrompaient ex abrupto les analyses d'experts dont les discours ne servaient qu'à meubler l'attente de scoops visuels .

Les débats politiques , séances de questions à l’assemblée nationale et joutes interlocutoires servent deux appétences, l’une de comprendre des échanges de mots  , l’autre d’observer des corps en lutte, dans l’attente de quelques coups bas ou reprises de volées.   Les gestes intriguent car l’opinion n’en soupçonne pas forcément les fonctions paralinguistiques mais entrevoit surtout  le non dit (sens caché, mensonge ? cryptage ? subliminal ? manipulation ?) . Et puisque , somme toute, ces politiciens semblent tous employer les mêmes mots , alors la seule chose qui semble les différencier serait plutôt leur style expressif,  leurs coups de gueule, phrases assassines, pirouettes rhétoriques et autres habiletés communicationnelles dont chacun aimerait être armé pour vivre mieux sa relation à un monde hostile  . 

Dans ce contexte,  l'émission « Déshabillons-les » (on pardonnera au réalisateur l’insoutenable légèreté lexicale )  propose de démêler le fond et la forme en analysant à sa manière postures discours, et valeurs  . Une des plus édifiantes de ces productions est celle intitulée les « Gestes des politiques » (à revisionner grâce au lien précédent ou sur le site de public Sénat sur lequel sont archivées toutes les émissions).

lundi 6 juin 2011

l'espace gestuel discuté à Copenhague (14-16 juin)

La troisième conférence de Scandinavian Association for Language and Cognition aura lieu du 14 au 15 juin 2011 à Copenhague, avec de nombreuses contributions consacrées aux recherches sur le geste. Celles-ci auront trait aux thèmes suivants:

- la fonction de l'espace gestuel et de ses trois dimensions comme métaphore et illustration de la pensée, avec diverses études pouvant être inspirées des théories de Mc Neill
- la codification de l'espace gestuel et de son amplitude dans des séquences d’enseignement de langue étrangère faisant appel au co-verbal (avec notamment Marion Tellier)
-  expérience par la méthode des juges sur les significations attribuées à des classes de gestes non co-verbaux, en fonction de leur structure dans la chaîne corporelle et manuelle-digitale : une nouvelle contribution aux recherches sur l'iconicité gestuelle qui semble novatrice car elle met en oeuvre le formalisme bien connu des études en langue des signes, mais s'applique ici à des locuteurs entendants  (un travail de Dominique Boutet)
- expérience de mesure par EEG sur le traitement multimodal par le cerveau de séquences verbales dans lesquelles varie l'expression faciale et la prosodie vocale (le cerveau traitant en priorité l’information visuelle pour la comparer à l'information acoustique émotionnelle).

en savoir plus: http://salc3.ku.dk/about/

lundi 2 mai 2011

autour de l'anthropologie du geste de Marcel Jousse , un colloque à Lyon

Jacques Cosnier nous fait part de ce colloque à venir  à l'université de Lyon, du 28 SEPTEMBRE au 1er OCTOBRE 2011 et qui marquera une rencontre singulière entre chercheurs, praticiens et artistes autour de l’anthropologie linguistique de Marcel Jousse:  http://rhuthmos.eu/spip.php?article261
Les thématiques concernées sont les suivantes: 
AXE I : Marcel Jousse, son contexte et la portée historique de ses travaux
AXE II : Méthodologie, terminologie, fondamentaux. Exégèse du corpus
AXE III : Confrontation avec des approches analogues
AXE IV : Regards de praticiens concernés par l’approche de Jousse
DOMAINES DISCIPLINAIRES CONCERNES (liste non exhaustive) :
anthropologie — arts du corps (théâtre, chant, danse, arts plastiques, cirque ...) —
cinéma — civilisations anciennes — didactique de la grammaire et du texte —
didactique des langues maternelle et étrangères — épistémologie — ergonomie —
ethnopédagogie — histoire de l'éducation et des pratiques pédagogiques — histoire des
idées — histoire des sciences — lettres classiques — linguistique générale et
phonétique — littérature — littérature comparée — mathématiques — mémorisation
textuelle — musicologie — neurologie , audio-phonologie, aphasiologie, neuropsychologie
— philosophie – physiologie de la perception — psychologie cognitive —
psychologie du développement – rhétorique — sciences de l’éducation – sciences de
l’information et de la communication – sciences et techniques des activités physiques et
sportives — sémiotique, etc.

jeudi 7 avril 2011

Atelier international sur le traitement de la voix et la parole dans les interactions sociales

Klaus Scherer dont il est question dans l'article ci-dessous, sera le principal conférencier à Avincia (18 avril et 19 avril 2011) d'un workshop dont l'argument est le suivant. "La voix et la parole jouent un rôle fondamental dans les interactions sociales, mais ils ont été relativement négligés, au moins dans les dernières années, par rapport à d'autres aspects des échanges sociaux, tels que, par exemple, les expressions du visage ou des gestes. En outre, la recherche sur la voix et la parole a été réalisée avec des méthodologies différentes et des objectifs dans des domaines différents, mais peu d'efforts ont permis d' identifier les questions de recherche communes, d'intégrer les résultats produits dans les différentes communautés ou tout simplement de diffuser des sensibilisations sur les multiples facettes du problème. L'objectif de cet atelier est de combler cette lacune en rassemblant les chercheurs de différentes communautés, en particulier les neurosciences, la psychologie et l'informatique, de partager les dernières découvertes sur les aspects sociaux de la voix et la parole et d'identifier les questions les plus importantes encore ouvertes dans le domaine ".


texte intégral de l'appel: http://sspnet.eu/2011/01/vspsi/

Le bagage, l'aéroport et le psychologue


Klaus Scherer est connu comme un des meilleurs spécialistes des composants émotionnelles de la voix. Une de ses études collectives , moins connues , a essayé de comprendre ce qui se passe dans la tête de voyageurs ayant perdu leur bagage à l’aéroport. 
http://www.affective-sciences.org/system/files/2000_Scherer_PSPB.pdf
Avec la complicité du personnel , un système de caméra caché sur un chariot à bagages (condition 1 du film)  était prêt à être déclenché à chaque perte de valise et permettait de filmer le visage et le buste des personnes . Puis dans l’attente des passagers sinistrés  , une autre caméra était dissimulée dans le bureau de réclamation , ce qui permit de filmer (condition 2) plus de 100 passagers , consentants a posteriori mais initialement filmés à leur insu  . Ces derniers étaient principalement européens, d’autres asiatiques (l’effectif ne permet pas aux auteurs de segmenter pour observer éventuellement des différences liées aux normes culturelles ).

Lors de chaque incident, un questionnaire oral était soumis par un enquêteur au cours de la plainte de la victime: quel type de voyage il effectuait, son estimation du préjudice moral subi, son sentiment sur l’efficacité du personnel et du service de  réclamation. Les  sentiment subjectifs ont été mesurés avant et après avoir interagi avec l'agent. Les questions étaient centrées sur deux dimensions:
 "Comment avez-vous ressenti lorsque vous avez réalisé que vos bagages ne vous seraient probablement pas rendus ? » (condition 1 )  et « Comment vous sentez-vous maintenant?   (condition 2)
Les auto-évaluations étaient notées sur les items suivants : en colère, irrité, démissionne,  triste, inquiet indifférent. Les agents de réclamations ont également évalué les émotions des passagers dans les deux  conditions . L’enregistrement vidéo permettait d’analyser  le visage et la partie supérieure du corps supérieur de chaque passager.  Pour analyser les affects de la voix , le signal de parole était soumis à un filtre passe-bas , dispositif qui masque  le contenu verbal pour fournir aux juges –expérimentateurs uniquement les indices paralinguistiques . Dans un autre sous-test, les juges (étudiants en psychologie) disposaient des deux informations , verbale et non verbale. Egalement dans une autre phase, ces juges devaient coder les expressions faciales à partir du FACS d’Ekman , en s’intéressait notamment aux « vrais sourires » et « sourires polis » ou de façade .

Les résultats de cette étude illustrent l’hypothèse d’autocontrôle social des émotions émise par les auteurs . En effet les  évaluations subjectives que portaient les voyageurs sur leurs propres affects tendaient à minimiser la charge émotionnelle , ainsi que le suggèrent  les oppositions entre 
-les auto-évaluations des sujets d'une part,
- les critères notés par les juges (vidéo et analyse vocale) sur la base d’une concordance inter-jugements et multimodale qui plaide empiriquement en faveur de l’identification correcte des émotions objectives.  


On pense évidemment ici à ce que Goffman a  écrit à propos de la  préservation des faces . Notamment dans " Les rites d’interaction  " il illustre de quelle manière l'individu  touché  par les faits peut chercher à communiquer (plutôt qu'à informer ) sur son état intérieur, pour produire  une impression adéquate sur l'environnement . Impression qui a son contraire dans l'expression , celle-ci lui permettant par un simulacre qui relève de la figuration, de  contrôler autrui ou faire impression sur son public, en tous cas de « faire bonne figure ». Le mobile n'est pas seulement de tenir des règles de considération pour  soi-même, mais pour l’interlocuteur. C'est un petit peu ce qu'on éprouve au quotidien lorsqu'on doit répondre positivement au  "comment allez vous ?" dont  l'intentionnalité  nous est d'autant plus perceptible lorsque précisément, le moral est en berne.  

mardi 8 mars 2011

L'empathie au prochain colloque de Cerizy , une belle rencontre interdisciplinaire en perspective


Le prochain colloque de Cerizy aura lieu sur un thème du plus grand intérêt pour l’analyse des émotions et du geste puisqu’il s’agit de l’empathie, avec la participation notamment de Jacques Cosnier, Jean Decety , Nicolas Georgieff , Serge Tisseron et d'autres contributeurs en neurosciences, psychanalyse, philosophie, psychologie... Voici l’argument de ce colloque :

La notion d’empathie suscite un intérêt renouvelé du fait des questions qu’elle pose au carrefour de la philosophie, des neurosciences, de la psychologie cognitive et de la psychanalyse.Définie comme la capacité de se mettre à la place de l’autre, elle est devenue l’un des paradigmes du débat sur la place de l’esprit dans son rapport au corps, à l’interface de la philosophie et des neurosciences. Ce que l’empathie incarne au-delà, c’est l’ambiguïté même de la notion d’esprit. S’agit-il de l’esprit de la psychologie cognitive (celui qui intervient dans la reconnaissance de la différence et du commun entre soi et l’autre ; ce qu’on nomme la théorie de l’esprit pour désigner le mouvement cognitif qui nous permet d’attribuer des états mentaux à autrui) ou s’agit-il plutôt de celui de la psychanalyse (celui qui se caractérise surtout par la place qu’il donne à l’affect et aux fantasmes dans la construction de soi et de l’autre, et dans les relations entre eux).
L’empathie se révèle notamment dans les activités qui visent à la reconnaissance et au soulagement de la souffrance de l’autre, tant dans l’empathie miroir (celle qui vise essentiellement à reconnaitre chez l’autre une souffrance psychique qu’il ressent ou qu’il a parfois du mal à appréhender lui-même), que dans l’empathie "interprétative ou métaphorique" (celle qui vise surtout à donner sens narratif à ce que l’autre dit ou montre éventuellement à son insu).
C’est aussi l’empathie qui est en cause dans l’intime conviction du juge, l’empathie sociale qui fait communauté, celle qui permet la transmission des valeurs au sein d’un groupe ou d’une société, les formes que celles-ci donnent au "nous" ; enfin c’est elle aussi qui est mise en jeu dans ce qui vise à influencer les individus ou les collectifs qu’ils constituent, du marché au politique en passant par la séduction amoureuse. 
L’empathie pose en tout cas une question commune: qu’est ce qui au juste se transmet entre le sujet empathique et celui avec lequel il emphatise? Et comment?
La découverte des neurones miroirs  et les travaux subséquents ont ouvert une nouvelle voie dans la recherche d’une explication au "fossé de la transmission" entre l’un et l’autre.
Créée pour rendre compte du plus ineffable, l’empathie offrirait-elle une nouvelle voie pour comprendre la complexité de l’humain à partir de l’exploitation cognitive et psychique de "ce qu’il y a là": la mécanique cérébrale et la neurophysiologie neuronale.

samedi 29 janvier 2011

Science et Vie Junior, dossier sur la CNV et la synergologie

Science et Vie Junior publiait ce mois-ci un dossier sur le thème « décodez le langage du corps » avec une enquête sur la synergologie. Ayant été contacté pour répondre à quelques questions sur ce thème  il m’a semblé intéressant de restituer le transcript de cette interview , celle-ci ayant été reflétée de manière très elliptique dans la revue .  Les points de vue suivants n’engagent que moi  (autres avis de gestualistes bienvenus)

- comment expliquez-vous l'engouement pour la recherche sur les gestes et la recherche sur la signification cachée de nos gestes?

Le non-verbal est un peu à la parole, ce que les interfaces interactives sont à l'écriture: des codes plus visuels, plus iconiques, plus en mouvement  , plus rapides, plus intuitifs,  plus émotionnels,  mais en même temps  encore plus ambigus que les mots .  On apprend à l'élève à former un imparfait du subjonctif (qu'il n'utilisera guère dans son CV ou en entretien) mais il est rare qu’il puisse se voir un jour en classe en vidéo, en train de communiquer . Conséquence : la CNV n'étant pas enseignée elle apparaît  comme un code emblématique qui  devrait donc nous livrer ses secrets.  Succès prévisible pour une  série comme " Lie to me " qui se nourrit d'un postulat : les mots peuvent être falsifiés et cacher des intentions, alors que le geste lui, ne trompe pas . A partir de là, les règles d'or de la  communication seraient tracées . 

 -   la recherche académique sur les gestes : comment la différenciez-vous de l'approche de P. Turchet ?
 La synergologie  s'intéresse surtout à la dimension inconsciente des gestes , donc  privilégie  les "extra-communicatifs" (par ex: se pincer le nez, cligner des yeux ) et évoque très rarement les gestes co-verbaux  (référentiels, iconiques, prosodiques, déictiques, synchronisateurs...). Bien sûr ,il y a l’inconscient qui parle, avec ses lapsus corporels. Mais  le geste sert aussi à ponctuer et illustrer la parole . Pointer du doigt, accentuer un mot , mimer une trajectoire , tracer en l’air des proportions, illustrer des objets du discours ou des concepts abstraits, sont des gestes qui peuvent désambiguiser le message verbal (lequel qui fait partie du  contexte d’interlocution , terme assez peu prisé en synergologie).

Autre différence, contrairement aux formations à la CNV , les recherches actuelles cherchent moins à “ décoder  le langage corporel ” qu’à  élucider la triangulation : pensée-geste-parole.  Mais elles ne se limitent pas à  la cognition , exemple les recherches sur les émotions , l’expression faciale , la voix  . En tous cas il faut être prudent avec les typologies interprétatives basées sur l’exemple (fut-il illustré par une photo très parlante) .  Si les expressions faciales peuvent être assignées à un code , largement validé, les gestes ne sont pas interprétables selon des cartographies symboliques.  Hormis dans les cas où l’iconicité est avérée (ex.  langue des signes) , développer un dictionnaire systématique des gestes s’avère imprudent.

- sait-on un peu mieux la part accordé au verbal e au co-verbal/para-verbal dans la communication inter-humaine?

Merci pour cette question,  car une légende continue de colporter que  la CNV représente 93% du sens et les mots 7%. A la base de cette extrapolation  A. Merhabian, qui écrivait que le récepteur d’une message parlé , éprouve   7% d’intérêt pour les mots , 38% pour l’intonation vocale et 55% pour l’expression faciale. Ce pourcentage « viral » a été cité des milliers de fois. On oublie de dire que l'auteur a relativisé ses propres chiffres : son expérience concernait seulement des situations à tonalité affective et sans sujets masculins, menées en 1967, avec du matériel rudimentaire,. Aujourd'hui on a des moyens techniques plus fidèles de savoir ce qui est perçu par les « récepteurs » et 7% pour les mots ne résiste pas un instant à l’analyse.

- les détracteurs de la synergologie estiment qu'il ne s'agit pas d'une approche scientifique , qu’en pensez vous ?  

Scientifique, empirique ? ce serait plutôt à des épistémologues de le dire en fonction des méthodes inductives constatées . J’objecterais simplement pour ma part qu’en théorie de l’information, un indice n’a pas la même valeur qu’un signal . L’indice a besoin  d’un contexte pour produire une hypothèse de sens , alors que le signal entretien une correspondance directe avec le code. Or, on a le sentiment que tout est pris pour signal dans la théorie synergologique . Les synergologues devraient rendre plus visible le corpus sur lequel ils ont élaboré leur théorie et leurs méthodes d'évaluation .  Les recherches « académiques » en laboratoire supposent des confrontations constantes entre résultats , publiés dans des revues avec calculs à l’appui , sous condition de recevabilité par des comités d’experts extérieurs au labo de l’auteur . Mais peut -être est-ce le signe d’une tendance nouvelle, une synergologue a soutenu une thèse à l'Université de Lausanne, il serait intéressant qu'elle soit publiée .
- Que pensez-vous de la manière dont la synergologie appuie ses théories sur des études de neuro-imagerie (cerveau droit/gauche/cerveau reptilien etc) ?

Prisées par la synergologie, la  théorie du cerveau tri-unique de Mc Lean et la spécialisation des hémisphères  de  Sperry (à la base de grandes découvertes cliniques ) ont rapidement séduit le monde de la communication  et du marketing car elles permettaient une compréhension synthétique des compétences cérébrales (cf. Herrmann)  . Tout est affaire d’exégèse :  le risque est d’extrapoler ces découvertes en cartographies corporelles , et  de construire une table de correspondances  rattachant tout segment corporel expressif à une compétence « controlatérale » du cerveau.

- Avez-vous des points précis sur lesquels vous n'êtes pas d'accord?

 Un exemple : la synergologie privilégie les gestes innés, avec une réticence à examiner les gestes qui varient d'une culture à l'autre, incorporés par mimétisme . Quelle proportion d’universalité trouverait-on dans les gestuelles des peuples ? le ratio doit être très élevé, personne ne l’a encore calculé. Mais il n’y aura pas que des archétypes:  l’observation montre que le regard mutuel, les postures et distances  interpersonnelles, la culture du  toucher, peuvent varier d'une culture à l’autre. Autres pistes montrées par les psychologuistes : les gestes métaphoriques d’abstraction, connectés sur le niveau lexical et syntaxique selon un modèle de représentation typique à une  langue (cf.  les études sur les  métaphores gestuelles du japonais, du turc , de l’anglais…).  Autres traits différentiels,  les gestes emblèmes ( Ekman en dénombre 250 en Israel ) , ou encore les gestes de pointage qui empruntent des formes ethniquement variées.  On observe aussi  selon les cultures des déclinaisons motrices (amplitude , tempo, fluidité,  tonicité, soudaineté, etc) qui peuvent modifier la  connotation du geste reçu par l’individu exogène … voire même le déranger . Pour différentes raisons il semble plus juste de  parler d’interculturalité , terme qui reconnaît la dimension transversale des signes mais sans effacer la richesse des particularités culturelles : les médias visuels s’en chargent déjà avec la mondialisation de l’image et le mimétisme des communicateurs.